L’assessment est-il vraiment utile dans le domaine du recrutement?

L’assessment est-il vraiment utile dans le domaine du recrutement?

L’ «International Journal of Selection and Assessment» se consacre régulièrement au modèle de psychologie de la personnalité appelé «Big Five». Selon ce modèle, il existe cinq dimensions principales de la personnalité.

Sa conception est considérée comme le modèle standard en matière de recherche sur la personnalité. Une récente édition de ce journal a exploré ce qui a été découvert au cours du siècle dernier sur la relation entre la personnalité et la performance.

Les résultats confirment les conclusions précédentes selon lesquelles la conscience, ainsi que la stabilité émotionnelle (neuroticism), sont des indicateurs valables de performance. Les trois autres caractéristiques du Big Five n’ont pas abouti à une prédiction valable.

Sur la base de ce résultat quelque peu consternant, un appel a été lancé pour établir un nouveau programme de recherche afin d’améliorer notre compréhension des liens entre la personnalité et la performance. 

L’importance du pressentiment 

En tant que chasseur de têtes qui doit régulièrement évaluer des candidats, mon opinion personnelle est que nous ne pourrons jamais vraiment explorer l’être humain sans lacunes. Cela signifie qu’il y aura toujours un point noir et que nous devons vivre avec ce déficit d’information.

À cet égard, je voudrais citer deux exemples concrets qui atténuent la validité d’un assessment. Comme premier exemple, je voudrais présenter une observation qui met en contraste l’intuition avec le résultat d’un assessment. La question est de savoir lequel des deux critères de décision conduit à un engagement plus prometteur.

Supposons qu’il y ait deux candidats dans le dernier tour d’un processus de recrutement. Sur l’un d’entre eux, j’ai un mauvais pressentiment, même s’il a reçu un excellent résultat d’assessment. Avec l’autre personne, qui termine l’assessment avec un moins bon résultat, j’ai un excellent pressentiment.

Admettons que j’engage la personne ayant obtenu un bon résultat d’assessment. Chaque fois que cette personne commettra une erreur, je me souviendrai de mon mauvais pressentiment et je ne serai guère compréhensif. En engageant la personne pour laquelle j’ai un excellent pressentiment, je serai beaucoup plus tolérant. Chaque fois que cette personne montrera un manque de performance, je le justifierai en expliquant que oui, je le savais et que ce n’est, en fait, pas si grave car cette personne a d’autres mérites. Ma sympathie ou mon antipathie envers une personne influencera massivement ma patience et mon comportement de leader. 

Comme deuxième exemple, je voudrais partager une expérience. Il s’agissait d’un processus de recrutement d’un directeur général. Pour la première série d’entretiens, trois équipes de deux personnes ont été formées, dont la majorité était des membres du conseil d’administration de la société en question.

Ces personnes étaient tous des managers chevronnés qui ont conduit les entretiens avec les quatre candidats par équipes de deux. À la fin, nous nous sommes assis ensemble et avons procédé à un classement. 

Sensibilités différentes  selon la culture 

Les quatre candidats ont ensuite été évalués par une entreprise d’assessment et le classement a été littéralement bouleversé. Comment se fait-il que plusieurs managers expérimentés puissent se tromper à ce point?

Le jugement d’un manager est-il si mauvais? La réponse est non, car le résultat totalement contradictoire de l’assessment est dû au fait que les évaluateurs n’étaient pas suisses et provenaient d’une culture différente qui, par exemple, abordait les litiges de manière beaucoup plus directe et moins diplomatique. Le résultat de l’assessment peut donc être différent selon les cultures.

Quelles sont les conclusions que je tire personnellement de ces constatations? Les bons dirigeants doivent être capables d’identifier les imperfections humaines avec bon sens et de les gérer par des compétences de leadership. Un assessment est donc à utiliser comme l’une  des sources d’information possibles, et non comme un outil de décision final. 

Heinz Wiesmann
oprandi & partner