Travail et loisir: existe-t-il un bon rythme?

Travail et loisir: existe-t-il un bon rythme?

Instantanéité, impermanence et incertitude sont devenues nos quotidiens pros/privés.
Comment (re)trouver un semblant d’équilibre dans ce profond bouleversement vécu actuellement?

Davor Komplita, médecin psychiatre à Genève, spécialisé dans les pathologies liées au travail, a accepté de nous livrer à coeur ouvert quelques pistes de réflexion.

En mode survie

La quatrième révolution industrielle a robotisé le monde professionnel, augmenté l’automatisation, l’intensification du travail et la financiarisation à outrance. La pandémie quant à elle, avec le télétravail, a renforcé l’intrusion du travail dans la sphère privée, avec en plus – pour beaucoup d’employés – un déconditionnement de la vie relationnelle, un isolement, des conditions ergonomiques pas toujours optimales et des visioconférences à longueur de journée.

Ajoutons encore le conflit entre la Russie et l’Ukraine qui a réveillé quelques-unes de nos peurs, bouleversé notre «sentiment » de sécurité et nous a remis en face de notre finitude. Le cocktail devient explosif pour notre santé psychique.

Quelles conséquences?

Des employés fatigués, voire épuisés, frustrés, isolés, anxieux, une multiplication des troubles musculosquelettiques et une amplification des risques psychosociaux.

Envisager de nouvelles habitudes?

Cela serait la formule idéale même si l’effort est de taille. Car nous privilégions volontiers le plaisir, l’insouciance et le divertissement à court terme. Nous optons pour des choix en fonction de leurs conséquences, de conditionnements, de croyances plutôt qu’à partir des désirs de notre cœur.

Nos cerveaux sont conçus pour éviter de grignoter trop de bandes passantes et, de ce fait, nous privilégions les modes automatiques en fonctionnant comme des playlists qui tournent en boucle. Nous préférons nos bonnes vieilles habitudes, plutôt que d’envisager un nouveau paradigme.

Une nécessaire prise de conscience

Notre «machinerie comportementale » ne demande pas de conscience de soi. Il y a pourtant urgence. D’abord pour les managers et ensuite pour les employés. Certaines démarches deviennent indispensables, à commencer par une meilleure connaissance de son monde intérieur, son fonctionnement, ses ressources, ses valeurs.

Il serait temps de se questionner sur les choix que nous faisons, nos habitudes et leurs effets sur notre vie à long terme. Vient ensuite la nécessité de renouer avec le collectif et de (re)créer ces liens professionnels si précieux à l’innovation, à la collaboration. Car les hommes sont forts lorsqu’ils œuvrent ensemble, s’engagent pour une cause (ou un projet) qui les unit et les font grandir en humanité.

Enfin, il est nécessaire de s’octroyer des moments sans technologie et de réintroduire une ritualisation dans nos quotidiens. Une bonne hygiène de vie, un sommeil de qualité, une alimentation saine, du mouvement régulier restent de bons moyens pour améliorer sa santé physique et mentale et garder l’équilibre. Néanmoins, il n’existe pas de recettes magiques. Le bonheur, c’est quand l’intérieur et l’extérieur sont en cohérence. Il appartient à chacun de faire son chemin et de trouver ce qui est juste pour lui.

Nadia Gendre
Responsable communication SUVA relations clients et communication