Votre recrutement est-il à la hauteur de vos ambitions ?

Votre recrutement est-il à la hauteur de vos ambitions ?

C’est en me penchant sur les raisons des échecs des fusions et des acquisitions que l’envie d’écrire cet article m’est venue.  On peut estimer que plus de 75% des deals de Fusac ne prennent pas une tournure aussi prometteuse que les investment bankers vous le faisaient miroiter, voire se plantent complétement. La raison des échecs est majoritairement humaine.  

En excluant les facteurs complètement étrangers à l’entreprise comme une nouvelle réglementation qui interdit la commercialisation d’un produit ou un coup d’état qui nationalise votre entreprise, il est édifiant de constater que toutes les autres raisons qui vont amener une opération de Fusac à partir en vrille sont liées aux comportements humains

En fait pourquoi un mariage entre deux entités juridiques échapperait-il aux mêmes aléas qu’un mariage entre deux personnes ? Au risque de déplaire aux juristes, l’hyper contractualisation de toutes les formes de d’interactions entre des personnes physiques ou morales n’a jamais empêché de naufrage. La gestion anticipée des risques permet au mieux de minimiser la casse en compartimentant et en isolant les thèmes de discorde

Voici les cas fréquents d’échec humains : 

  • Le dirigeant ébloui par son égo qui veut racheter une marque prestigieuse et qui en fait une affaire personnelle. On sera confronté aux réactions de déni où les signes objectifs de risques seront ignorés ou volontairement sous-estimés.  
  • Des cultures d’organisations trop différentes où avec le temps les particularités de chaque organisation deviennent des barrières de communication infranchissables. 
  • Le coup de foudre, qui court circuite la pensée rationnelle et qui vous lance dans les bras de l’autre en zappant que son éthique est laissée en friche. 
  • Une attitude, un comportement arrogant de l’acquéreur qui fait fuir les meilleurs et qui laisse une couteuse coquille vide. 

On peut continuer à égrainer la liste, mais vous avez compris que toutes les raisons de se fracasser contre un mur viennent majoritairement de comportements erratiques. 

Je reviens donc à ma première question, votre recrutement est-il à la hauteur de vos ambitions ? Puisque nous savons que les pires plantages de deals complexes sont majoritairement dus aux travers de comportements et de jugement, allons-nous enfin arrêter de recruter des collaborateurs sur des critères qui ignorent superbement ces risques ? 

Le mot ambition porte l’idée d’un désir ardent de posséder quelque chose ou de parvenir à faire quelque chose. Reposons-nous la question de ce que nous voulons vraiment, de ce qui est porté par un désir puissant.  

Recruter de nouveaux collègues porte la promesse d’un futur que nous pouvons façonner en nous entourant des bonnes attitudes et des compétences requises, oui dans cet ordre. 

En la matière il n’y a pas de recette absolue pour réussir, en revanche il existe des pratiques éprouvées pour sinistrer votre recrutement. 

La plus nocive étant la croyance que le temps et l’énergie consacrée à un recrutement est proportionnel à la position hiérarchique. Le recrutement d’un CFO est d’une complexité certaine, les enjeux et impacts sont lourds et le processus doit être conduit avec vigilance et attention. La recherche d’un comptable junior est également complexe et les impacts portent à conséquence dans une logique interne de chaine de valeur et d’écosystème de l’entreprise. 

Un management qui confine certains rôles à l’exécution seule de tâches, sans comprendre que l’attitude, l’envie d’apprendre et la recherche de sens apporteront considérablement plus de valeur et de qualité à toute l’organisation fait courir un vrai risque à son entreprise. 

La première mesure d’élévation de la qualité du recrutement est donc d’identifier ces managers d’un autre temps et de les reformater ou de s’en séparer car ils ne laisseront entrer dans l’entreprise que des profils à très étroite bande passante. 

La seconde erreur trop fréquemment observée et celle de la précipitation pour recruter un profil qui répond aux exigences du moment. Quel bonheur de trouver la pièce du puzzle qui s’encastre parfaitement dans l’espace libre qui semblait n’attendre qu’elle. Compétences actuelles et attitudes correspondant à une phase de maturité de l’entreprise sont certes essentielles mais il est irresponsable et trompeur de recruter des profils dont on sait qu’ils seront frappés d’obsolescence programmée très rapidement. Soit parce que l’organisation n’a ni le temps ni les moyens de former ses collaborateurs pour les maintenir à un bon niveau d’employabilité soit parce que le manager en charge ne possède pas la capacité de se projeter dans un contexte évolutif qui exigera des dimensions complémentaires. Un comptable qui ne parle pas de langue étrangère dans une organisation qui s’internationalise, un développeur pointu sur une technologie vieillissante qui ne se replonge pas dans des langages de programmation actuels vont se retrouver dans des voies sans issues et se faire rapidement rejeter par l’organisation qui leur avaient trouvé toutes les vertus. 

Le troisième axe d’attention, ira bien au-delà de s’assurer que les deux précédents points ont été adressés. Il s’agit des références et de la validation du parcours des candidats. Entre la falsification des diplômes et des certifications et les comportements toxiques chez des employeurs précédents il est essentiel de s’assurer de ne pas laisser entrer le loup dans la bergerie. Dans la quasi-totalité des cas où j’ai dû prendre des actions disciplinaires à l’encontre de personnes harceleuses, il y avait eu des signaux assez clairs de comportements semblables avec les employeurs précédents

Le dernier élément est une cuture toxique, ou de fausses croyances, compliqués à reformer car elles prennent leurs racines dans la culture même de l’organisation. La plus belle orchidée ne vivra que quelques jours si vous la transplantez dans une terre contaminée. La meilleure façon de se protéger d’une culture toxique, qui détruira vos talents fraichement recrutés, est tout simplement d’ouvrir son organisation à la diversité. Nationalités, genres, âges, ethnicités, parcours de vie, situation de handicap… bref tout ce qui fait que l’on n’aura pas une unicité de regard et de perspective mais une intelligence collective qui valorisera la performance du groupe. Le confort de l’entre-soi est souvent la source d’une lente dérive vers des comportements destructeurs qui ne sont jamais détectés par les perpétrateurs, mais toujours dénoncés par les nouveaux arrivants. 

Olivier DESLANDES
Spécialiste stratégie RH, développement des organisations et transformation. 
Membre expert Swiss HR Patrol