L’enjeu de la diversité dans le monde digitalisé

L’enjeu de la diversité dans le monde digitalisé

L’innovation et la recherche d’efficience sont inhérentes à l’espèce humaine. Chaque création, en commençant par l’invention de la pointe de silex, oriente le monde. A un niveau directement global, la digitalisation et l’avènement des mondes virtuels modifient le rapport au temps et à l’espace: les frontières entre les différentes sphères géographiques, privées et professionnelles tendent à s’effacer. La question de la diversité dans ce monde globalisé se pose.

Virtualisation  de l’emploi

Le marché du travail devient virtuel. Les plates-formes en ligne permettent d’accéder à des ressources qui nous paraissent potentiellement illimitées, tant du point de vue de l’offre de travail que de la demande. Des applications mettent directement en contact entreprises, voire clients finaux et forces de travail. Les entreprises peuvent notamment rechercher et engager des professionnels indépendants pour des projets spécifiques. Les relations de travail en sont modifiées avec un déplacement de la prise de risque qui n’est plus portée par l’entreprise, mais par l’individu – et un sentiment de concurrence accru.

Digitalisation et standardisation

Parallèlement à la question des conditions de travail, l’enjeu majeur qui se dessine au niveau de l’entreprise et de l’individu tient à la diversité.

Comme ce fut le cas avec la mécanisation et l’automatisation, les mondes virtuels des plates-formes en ligne requièrent une standardisation. Ne peut être digitalisé que ce qui est reproductible, segmentable, quantifiable.  L’objectif de la digitalisation avec la standardisation comme effet collatéral est de gagner en efficience. Ces gains d’efficience sont particulièrement recherchés par les RH confrontés à une pléthore de candidatures, due à la visibilité accrue des offres d’emploi. En déléguant à  une intelligence artificielle (IA) la phase de présélection, la compagnie Unilever a pu réduire drastiquement le temps investi dans le processus de recrutement. 

Paramétrage de l’IA

Le rapprochement entre le profil de la personne et l’offre d’emploi se base sur des algorithmes prédéfinis. Le paramétrage de l’IA aboutit à une homogénéisation en forme d’entonnoir. Les critères de sélection objectivables tels que la formation tendent à prendre le dessus, voire à devenir éliminatoires. Sans la formation adéquate et adéquatement formulée, le dossier est immédiatement recalé. Un nouveau «barrage de la secrétaire» est mis en place. Le/la candidat-e qui ne maîtrise ni la technologie, ni les codes et mots-clés en vigueur doit savoir s’appuyer sur une expertise externe, agence de placement, coach pour passer la phase de présélection.

Oser  la «dé-normalisation»

A travers la recherche du bon profil du candidat, l’entreprise vise à éliminer le risque, mais le piège d’une normalisation des parcours et d’un appauvrissement des expériences se dessine. C’est d’autant plus questionnable que le profil linéaire existe de moins en moins et d’autant plus paradoxal que la diversité est reconnue comme un facteur de performance.  En contrepoint de ce monde toujours plus digitalisé, l’accent est mis sur les compétences spécifiques et les soft skills, qui se construisent justement à travers le parcours professionnel et personnel dans toute sa diversité. In fine ce sont ces compétences relationnelles qui distinguent l’humain de la machine, qui nous différencient entre êtres humains et qui permettent la créativité, l’innovation et la recherche d’efficience. D’où l’importance, pour les entreprises, de s’assurer que les processus de sélection restent ouverts et ne pas hésiter à oser la relation directe avant la présélection. Le stage permet par exemple aux individus avec des profils atypiques de faire leur preuve.

CHRISTELLE MAIER
CO-DIRECTRICE
CAP CONSEIL & ACCOMPAGNEMENT PROFESSIONNEL